Dans nos sociétés de surabondance consumériste, je suis convaincue que l’acte poétique est une arme de résistance. C’est pour cela que mon travail revendique une forme de poésie, s’animant plutôt de légèreté, de sensations ou d’émotions. Il cherche à ouvrir, à creuser l’imaginaire à travers deux clés principales : le blanc et les plis.

Le blanc est la teinte idéale pour laisser la part belle à la forme. Il dévoile la nature même de la matière, en sublime sa quintessence. Terre blanche par excellence, la porcelaine s’est imposée à moi. Très vite j’ai compris la mémoire qu’elle porte en elle : elle révèle après séchage et cuisson les traces des mouvements, des gestes et des matériaux dans lesquels je la coule. C’est le travail de la porcelaine qui m’a menée vers les plis. Depuis, ils me fascinent.

Comme le blanc qui est la teinte obtenue en mélangeant la lumière de toutes les couleurs, le pli rassemble en lui-même toutes les déclinaisons possibles d’une forme : les creux, les pleins, les courbes, les droites, les notions d’endroit, d’envers, de dedans, de dehors… Il permet au plat de devenir volume, au blanc de devenir lumière. Il étire l’espace en confondant le grand et le petit, le proche et le loin. Le pli évolue en toute indépendance : il est à la fois sa propre source et son propre aboutissement. Il crée des étreintes mêlant la présence à l’absence, l’apparition à la disparition. Il représente aussi pour moi le langage de l’invisible et la genèse du mouvement originel. Travailler le pli est une façon de vivre une dépossession de moi-même, d’accéder à un mode d’être anonyme et paradoxalement d’asseoir ma présence au monde.